Date et lieu | 2023-07-21 - À distance |
---|---|
Auteurs | Élisa, Manuel, Gwenaëlle |
PJ | Galavar, Hester, Sulmar |
Séance précédente | Session 57 |
Séance suivante | Session 58 |
Dix ans passent. Nos héros continuent chacun leurs aventures de leur côté.
Après être revenue des Prairies Ultraviolettes, Hester ne s'attarda pas à la Cité Violette très longtemps, et décida de rentrer au Pays Vert pour retrouver ses parents et prendre soin d'eux. Son retour dans le foyer familial fût doux et tendre bien que très surprenant pour ses parents. Pour ne pas inquiéter les habitants de son village un peu frileux face à tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la magie elfique et pour justifier la ressemblance frappante avec ses parents, Hester se fit passer pendant les années où elle vécut avec eux pour la fille de sa grande sœur Leva.
Pendant plusieurs années et chaque été, elle recevait Timéon pour la saison chaude. Elle lui apprit l'art de la chasse, à différencier les plantes comestibles de celle pour le poison. De son côté, elle chercha à en apprendre plus sur les elfes et s'essaya plus sérieusement à la Castromancie.
La vie était douce pour Hester (bien que revivre une deuxième puberté ne fût pas une partie de plaisir) qui appréciait plus que tout ne plus être vue comme une paria par les villageois.
Sans surprise, sa croissance ne fût pas aussi impressionnante que lorsqu'elle cohabitait avec Eudoxie, mais elle en était tout de même satisfaite.
Elle ne rendit visite à Galavar qu'une seule fois pour l'aider à libérer ses amis anarchistes et entretint une correspondance suivie avec Érutan.
À la fin de la huitième année après son retour, la vieillesse emporta son père et, 6 mois plus tard, sa mère. Les visites de Timéon avaient cessé et elle ne recevait plus de nouvelles d'Érutan. Plus rien ne la retenait ici. Elle revendit la parcelle de terre de ses parents pour se faire un peu d'argent et essaya de retrouver la trace de ses amis à travers les pays arc-en-ciel, suivant les rumeurs mais sans succès. Pendant son périple, elle travailla par-ci par là, mettant ses compétences au service d'autrui pour se financer et assembler les ressources nécessaires pour son prochain objectif : repartir dans les prairies, où plusieurs rumeurs indiquaient que ses anciens compagnons se trouvaient mais aussi pour tenter de retrouver Leva qu'elle n'avait pas vu depuis 10 ans, et savoir si Eudoxie avait fini par trouver la Cité Noire.
Qu’a donc fait Galavar pendant dix ans ?
Il a commencé par faire un état des lieux. Le croyant mort, sa femme s’était mise en couple avec sa meilleure amie Deedee, qui faisait un bien meilleur parent pour ses enfants qu’il ne l’était lui-même. Les anarchistes avaient enfin réussi quelque chose à la Cité Violette, mais se disputaient maintenant le terrain avec un grand nombre de criminels. Son périple dans les prairies ne lui avait pas permis de découvrir précisément ce qu’y cherchait la Fleurengrenage, ni comment la contrer.
Évidemment, il décida de rester à la Cité Violette. Les retrouvailles avec sa famille furent mitigées, et il décida de leur laisser du temps. Celles avec les milieux anarchistes furent beaucoup plus enthousiastes, et il redevint rapidement une des figures majeures du mouvement, ce qui perturba un peu plus Deedee.
Très vite, il lança une procédure de divorce à l’amiable, et l’ancien couple Bruno décida que Galavar verrait ses enfants un week-end sur deux. Il avait déjà fort à faire au quotidien de toute manière avec l’éducation d’un jeune quatrelin avide de connaissances et débordant d’enthousiasme pour la plus grande ville qui lui eut été donné d’arpenter.
Il fut peiné de voir le reste du groupe repartir, mais était sûr de sa décision de rester. Il continua tout de même de se fixer des séances de pêche avec Velena, ou de programmer à la Lanterne des spectacles d’un certain danseur/conteur au sabre noir. Il envoya tous les étés Timéon en colonie de vacances au pays vert, chez sa tata.
Au bout d’un an à peine après son retour, le mouvement anarchiste se fissura entre ce qu’on appela la ligne Deedee et la ligne Galavar. L’ancien de la Fleurengrenage, pour qui la fin justifie les moyens, souhaitait franchir une ligne rouge, qui paraissait inconcevable pour sa camarade. Le projet d’alliance avec les hexades proposé par Galavar l’emporta de justesse, et la collaboration des anarchistes et des criminels s’avéra payante.
Très vite, une petite partie des quartiers huppés fut reprise, ainsi que la majorité du quartier commerçant. Les hexades mirent la main sur les échanges commerciaux de la cité, tandis que la ligne Galavar amena un peu plus de justice sociale à l’intérieur de la ville, avec la mise en place de minimas sociaux qui permirent entre autres d’aider les réfugiés bleus, ou d’un parlement municipal dont notre héros fut le premier président, qui vota plusieurs taxes redistributrices et lois émancipatrices pour les minorités.
Une fois la ville un peu pacifiée, Galavar s’attela à reconstruire le mouvement anarchiste, sans grand succès. Pour faire oublier les compromissions avec les hexades, il tenta de remobiliser contre la Fleurengrenage, mais l’ennemi paraissait maintenant bien lointain. La vie s’était améliorée au Pays violet, et peu de toutous se sentaient motivés pour exporter la révolution. Essayant de se réconcilier avec Deedee, il mit sur pied un projet d’évasion pour Marky, Joey, et Johnny, leurs camarades des Héros du peuple.
Avec l’aide d’Hester, et à la tête d’une toute nouvelle bande de toutous qu’il baptisa l’escouade cyclone, il réussit à faire évader Joey et Johnny, et découvrit que Marky avait péri en captivité. Joey rejoignit ensuite la ligne Galavar, et Johnny la ligne Deedee. Les relations entre les deux camps s’apaisèrent un peu, mais il subsista toujours une tension idéologique insurmontable.
Essayant encore de remobiliser contre la Fleurengrenage, il tenta par tous les moyens de faire analyser son disque de force solide, certain qu’il contenait des informations capitales, ainsi que son petit cristal violet. Les deux objets gardèrent cependant leur mystère.
Il envoya également de nombreuses personnes à la recherche de Rion, avec pour mission de lui subtiliser sa main. Comme il l’avait lui-même fait pendant sa jeunesse, il dépêcha des personnes pour intégrer et espionner la Fleurengrenage dans plusieurs villes. L’escouade cyclone s’étonna d’une consigne particulière donnée à chaque espion : De protéger par tous les moyens si nécessaire un certain Sulmar Od Jihab, ancien membre renégat des opérations spéciales, probablement recherché par la corporation.
Une routine s’installa peu à peu dans la vie de l’homme à tête de chien. Timéon grandissait, devenant chaque jour un peu plus un jeune homme. Ses propres enfants étaient bienveillants à son égard, même s’ils se sentaient plus proches de leurs deux mères. Le parlement municipal faisait des progrès, même si chaque réforme sociale s’arrachait au prix de longs mois de débats. Sa petite indemnité parlementaire lui permettait de vivre correctement.
On parle de Galavar, évidemment qu’il essaya de tout foutre en l’air.
Le scandale éclata lorsque plusieurs journalistes firent le rapprochement entre Georges, un organisateur de combats de rue, également champion poids moyen, et le fameux président du parlement municipal. Cet individu louche aurait également commis de nombreux autres méfaits : Il aurait été en contact régulier avec une certaine Sangua de la Fleurengrenage, avec laquelle il aurait échangé des informations. Il aurait commercé avec des satrapes peu scrupuleux pour faire agrandir une arme de force solide. Enfin, il aurait mis un contrat sur la tête d’un certain Belegol, un truand nain à la petite semaine.
Éclaboussé par ces révélations, Galavar dût se mettre en retrait de ses fonctions parlementaires, laissant la place libre à une reprise en main politique de Deedee. Cependant, cette dernière se rendit vite compte que l’alliance établie avec les hexades il y a des années était trop bien consolidée. De plus, les seigneurs chats semblaient prêts à contre-attaquer pour reprendre le terrain perdu. Elle n’eut donc d’autre choix que de maintenir l’accord, au prix d’un renoncement personnel dont elle tint Galavar responsable, tendant les relations entre eux.
Privé d’argent, l’homme à tête de chien n’eut d’autre choix que de diversifier ses sources de revenus, en plus des combats clandestins. Celui qui n’avait jamais obtenu aucun diplôme se retrouva à donner quelques cours à l’université, en anthropologie des prairies ultraviolettes. Il arrondit également ses fins de mois en mettant à contribution ses médiocres talents de biomancie, soulageant des douleurs lombaires, ou décongestionnant des sinusites.
En parlant de biomancie, après toutes ces années, son bras reconstitué commença à lui faire mal. Certains matins, il se réveillait avec un engourdissement jusqu’au coude, qui ne disparaissait qu’après quelques minutes. D’autres jours, il ressentait des élancements qui duraient des heures. Après avoir consulté des spécialistes, la sentence tomba : il ne garderait pas ce bras là jusqu’à la fin de sa vie. Cinq ans, dix tout au plus. A partir de ce moment, Galavar se décida à étudier un peu plus sérieusement la biomancie, dans l’espoir de trouver des sorts capables de stopper le processus dégénératif.
Cela faisait maintenant neuf ans qu’il était de retour à la cité violette, lorsqu’un des espions qu’il avait missionné revient avec des nouvelles. Rion avait été retrouvé assassiné dans des circonstances mystérieuses au pays bleu. L’espion s’était introduit à la morgue, et en avait profité pour subtiliser sa main mécanique, qu’il remit à Galavar.
Se souvenant de sa vieille promesse, il chercha Sulmar pour la décrypter avec lui, en vain. L’ancien chasse-machine semblait avoir totalement disparu de la circulation, aussi décida-t-il de tenter de l’analyser lui-même.
Ce fut à peu près à cette période qu’il disparut de la cité violette. La dernière soirée où il fut aperçu, on le croisa apparemment à la Lanterne, passablement ivre, sombre et renfrogné, les yeux dans le vide, triturant machinalement une étrange bague en forme de tête de mort.
Le lendemain, Timéon, maintenant adulte, trouva une lettre sur la table du salon, disant « Essaye de manger équilibré. Prends des douches. N’oublie pas la justice sociale. ». De la même manière, ses enfants trouvèrent également un mot sous leur porte : « Vous grandissez magnifiquement bien, même si je n’y suis pour rien. Continuez comme ça, on se reverra. Je vous aime. G ».
Certains disent l’avoir vu repartir dans les prairies avec un vieux vautour déplumé. D’autres prétendant l’avoir vu rôder dans les rues de la cité Émeraude, une étrange main de métal accrochée à la ceinture. Quoi qu’il arrive, durant toutes ces années, l’homme-chien grisonnant aura laissé son empreinte à la cité violette, où il paraîtrait même qu’on utilise dorénavant l’expression « Par Galavar », pour signifier à son interlocuteur que ses paroles semblent un peu louches.
De retour dans les Terres Arc-en-ciel, Sulmar se sent pris de sentiments contradictoires : de l’apaisement à la dépression, de l’excitation de retrouver avec un œil nouveau ses terres natales à l’ennui du déjà vu, il doute. Accompagné de sa chouette, il décide de se présenter chez Jane Old Jihab. Elle est la 2ème femme de Jiran, père de Madhina et Fatya, qui les a élevées pendant leurs 2 ans de mariage et dont le départ du foyer n’a pas été étranger à sa relation épineuse avec la jeune conquérante Fatya, déjà revêche.
Sulmar partageant avec Jane à la fois un passé et des réserves envers les positions pro-Inquisition de la famille Od Jihab, il frappe avec enthousiasme à la porte de sa petite maison au bord du Lac de la Tâche Bleue, bien humble pour le cercle Od Jihab mais si charmante et chaleureuse. Et elle les accueille, Sulmar et sa chouette. Elle vit maintenant seule au fond du terrain de Jiran, dans une vallée marécageuse un peu hostile mais si près du lac qu’on peut le voir de la fenêtre du 2ème étage, en se mettant sur la pointe des pieds, quand il fait beau.
Les premiers temps, Jane exprime de la curiosité envers le périple de Sulmar ; il est heureux de partager avec elle, mais les mots sont toujours trop fades pour les images. Sulmar reste fasciné par ses rencontres, il pense aux ruches, à la baleine du sous-monde, il pense à ses amis de la caravane. Parfois, c’était rude, mais c’était bien. Jane se détourne vite de ses récits laconiques ponctués de regards vagues. ; en fait, elle a peu de temps car elle doit renouveler les bottes de paille placées aux pieds des murs de la maison pour isoler l’intérieur à l’approche d’une vague de froid. Elle invite Sulmar à l’aider. Il se sent ballotté entre le plaisir de se sentir utile et sa nostalgie rémanente de paradis perdu.
Sulmar s’ennuie.
Sulmar rêve encore de communauté.
Les semaines, les mois passent, il aide de moins en moins sa tante. Il rêvasse et passe chaque jour des heures à parler à sa Katca$h, perplexe, et à graver les images qu’il lui restent – à vrai dire assez peu. Sur des plaques de bois d’abord, puis sur son corps, sur ses cuisses et son ventre, discrètement, puis finalement sur ses bras et son front. Il suit des yeux l’aiguille, guidée moins par sa main que par ses souvenirs, former sur sa peau les inscriptions des colonnes, les runes, quelques bribes du réseau vome… Sa peau prend des airs de circuit imprimé. Il repense à ses amis Chiru et Gigi, et à sa chère amie Solenopsis – ah, quelle vie rêvée que la sienne ! d’un monde humain protégé à la qualité de vie inégalée des vomes en ruche !
De jours fatigués en nuits tristes, Sulmar prend finalement la décision de se faire aider. Ses idées sombres sont assurément malades. Il arpente alors le bureau de tous les médecins du pays rouge pour confirmer ses suspicions : il est atteint, et si ce n’est pas la rosemarinose, ce sera le scrapulus. Mais tous incompétents, aucun ne confirme le diagnostic, et Sulmar est toujours plus mélancolique. Il ne quitte presque plus sa chambre.
Un jour où Jane, venant chercher son linge sale, demande à Sulmar pourquoi il garde toujours une glacière alimentée en froid près de son lit, l’idée éclate : puisqu’il n’existe pas de lieu pour lui, il va le créer. Il relie…d’un côté, son désir personnel profond de trouver un lieu de liens… les ovules de la Restauratrice… d’un autre, les laboratoires obscurs qu’il avait aperçus dans les sous-sols de la Fleurengrenage, les recherches guidées par l’Inquisition sur la préservation des races, la technicité de l’entreprise en manipulation biologique… Ca y est, il sait : Sulmar va fonder sa propre communauté !
Dès le lendemain, il se met en marche pour la Métropole et envoie Katca$h porter un message anonyme à Enrike de Bianco, médiateur placardisé de la Fleurengrenage. Sa carrière est dans une impasse dit-on, et même si Sulmar ne l’a jamais rencontré, il imagine qu’il n’a pas forcément les intérêts de la Fleurengrenage et qu’un peu de magouille pourrait apporter de l’action à son quotidien…Le mot transmis par Katca$h dit, en substance : « Ancien de la boîte, cherche incubateur secret pour œufs précieux ».
Ainsi débute l’aventure de Sulmar pour enfanter 20 descendants de la Restauratrice. Car Enrike répond présent, et met en contact Sulmar avec un ami à lui, un certain seigneur anonyme de la Cité Violette, et les 2 vont l’aider dans son projet fou.
Sulmar donne pour directives à Enrike de faire féconder les ovules qu’il lui présente par une diversité la plus poussée possible de donneurs : Quatrelins, Vomes, Arc-en-cieliens… Tout ce qui sera compatible sera bon à accueillir. Il fournit lui-même un échantillon qui lui donnera 3 filles : Whisper, Sunray et Daisy (son 2ème choix après Sulmar-3-corps, qui a été censuré à l’enregistrement).
Un jour qu’il s’aventure à entrer dans la Fleurengrenage pour surveiller l’évolution des fœtus, Sulmar décide sur un coup de tête de monter dans les étages. Il passe devant le bureau de Sangua, repense à ce jour où il avait pris un café avec elle pendant que le petit Olivet dérobait le fameux dossier « G »…pris dans ses souvenirs, il croit être frappé d’hallucination quand il aperçoit Galavar traverser le couloir. Il commence à s’avancer pour le saluer, se cogne, se ravise alors… Il doit rester incognito. Un peu déçu de ne pouvoir le saluer, il se sent surtout soulagé : quelques minutes de discussion avec l’ex-leader charismatique de la caravane et Sulmar aurait pu renoncer à son rêve.
Mais il pense encore à ses amis. Entre ses visites secrètes à la Fleurengrenage, pendant que les fœtus poussent, il bivouaque à la frontière du pays vert. Il rêve pour ses enfants qu’ils soient forts et combatifs. Il s’imagine avec eux dans quelques années, dans les forêts inquiétantes du pays vert, leur apprenant les ficelles du survivalisme. Il espère très fort qu’ils rencontreront un jour leur tata Hester !
Un an plus tard, soit trois ans depuis sont retour des prairies, il rentre au pays rouge, avec ses vingt bébés. Ce sont en fait vingt filles : Sulmar, ravi, y voit un lien avec le voyage prolongé des œufs dans la glacière.
Jane l’accueille encore.
Ils élèvent les petites. Le jour de leurs trois ans - le temps qu’il leur aura fallu pour réunir les agréments - Jane et Sulmar accrochent fièrement l’enseigne de leur auberge/école de survie: « La Famille ». Katca$h est chargée de répandre la nouvelle de l’ouverture à tous de ce qu’ils définissent comme un tiers-lieu.
Curieux, des pèlerins, artistes et mercenaires de passage autour du lac de la Tâche Bleue viennent interroger sur la pouponnière. Jane et Sulmar laissent libre court à leur imagination pour expliquer sans se compromettre. Chaque rencontre fait naître une nouvelle fable, et certains, charmés, décident de rester. Quatre ans plus tard, quarante habitent là : Sulmar, sa tante, ses filles, et sa famille choisie.
Sulmar ne s’ennuie plus.
Du tout.